dimanche 30 juin 2013

Les melons de la colère de Bastien Vivès


Depuis quelques années Bastien Vivès impose son immense talent dans le monde de la bande dessinée. Il est tout aussi jeune que talentueux et ça le rend fascinant à mes yeux. D’autant qu’il s’est très rapidement affranchi des codes et des thématiques habituelles de la BD. Si pour moi il est une vraie révélation, son trait déconcerte quelque peu le grand public qui aime la norme et non pas la créativité. Mais lui s’en fout joyeusement et fait ce qu’il veut en permanence.

Il y a quelques temps, il nous a offert une étonnante BD pornographique "les melons de la colère". Le titre évoque le livre de Steinbeck, mais la référence s'arrête là. Si l’on cherche un peu sur le net, on se rend compte que cela à fait débat car elle dérange. Car comme à son habitude Vivès ne s’est pas contenté de faire bassement du porno. Il a imaginé une histoire sulfureuse, décalée et avec un humour cynique. De quoi déranger l’inébranlable moralité de ces pauvres lecteurs pensant y trouvé la dose classique de plaisir masturbatoire. Alors, ça parle et ça râle avec toute la dose de mauvaise foi cachée dans une fausse moralité de bon aloi. Le crachoir est tenu par des gens qui souvent n’ont pas lu l’album et/ou se focalise sur deux trois dessins clés.

Pour avoir lu l’ensemble de ses albums, je trouve une logique à cet album de la part de Vivès. Comme je l’évoquais, il a toujours la volonté de surprendre, d’aller là où on ne l’attend pas. Pour lui quitte à faire du porno, autant que cela soit esthétique et différent. Il n’y a aucune volonté masturbatoire dans ce récit mais plutôt celle de titiller le désir ou le fantasme pour mieux le tordre et en montrer l’absurdité.  
Il y a une certaine forme expiatoire dans ce récit qui fait écho à Elle(s), l’un des premiers albums de Vivès. Une histoire d’amour adolescente, ou l’une des héroïnes était dotée d’une forte poitrine. C’était certes agréable, mais était excessif, n’apportait rien au récit et à finalement détourner de cette histoire une partie des lecteurs. Les melons de la colère est comme un retour sur cette anecdote, car si les seins semblent restés un objets de fantasme pour l’auteur, il pousse cette fois-ci la chose à l’extrême. Cela devient risible. Comme un besoin de tordre le fantasme au maximum pour en montrer l’absurdité et la banalité. Même chose pour certains hommes de l’histoire doté de sexe hors norme et qui deviennent plus objet de honte ou de handicape, loin des poncifs de la pornographie. Attardons nous un instant sur un autre détail de l’histoire qui dérange. Il y a une scène d’inceste entre frère et sœur.  La encore nombreux sont ceux qui s’offusquent de ça, mais il n’y a ni violence ni perversité ou apologie de la chose. 
Encore une fois la volonté de déranger et d’interroger le lecteur sur ses fantasmes. Au final beaucoup de bruit pour rien, il n’y a rien dans ce récit qui ne soit différent de la représentation classique de la pornographie (film ou BD), simplement une mise en abîme pour mieux nous interroger sur la banalisation, la laideur et la violence de la pornographie.

Finalement la seule vraie question que semble soulever ces flots de critiques, c'est pourquoi Vivès empêche les honnêtes gens de se masturber tranquillement ?









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